La Sierra Leone et la Guinée entretiennent des relations amicales depuis l’époque de l’indépendance. Cependant, des fissures entre les deux pays sont apparues ponctuellement depuis les années 1990 à propos de l’interprétation de leur protocole frontalier. Plus récemment, lors des élections présidentielles guinéennes, les deux pays sont entrés dans un conflit diplomatique en raison d’accusations liées à l’ingérence dans le processus électoral guinéen, tandis que des citoyens sierra-léonais, vivant dans les zones frontalières avec la Guinée, ont intensifié leurs revendications contre l’occupation présumée de leurs terres par des militaires guinéens.
A cet effet, trois facteurs clés peuvent être identifiés comme étant à l’origine des conflits entre éleveurs et cultivateurs, à savoir : « Des cadres réglementaires inadaptés et faiblement mis en œuvre ; des moyens de subsistance qui ne s’adaptent pas au climat et ne résistent pas aux catastrophes naturelles, ce qui entraîne une concurrence pour les ressources naturelles et la gestion inefficace des frontières, l’absence de coordination des mouvements transfrontaliers de bétail, et le manque de données sur ces mouvements ».
Malgré une baisse de la violence ces dernières années, les problèmes ne sont pas résolus – et si l’on y ajoute le nombre croissant d’éleveurs de bétail migrants entre les deux pays – la poursuite des conflits pourrait entraîner une détérioration de la cohésion communautaire et menacer de déstabiliser la sécurité de la région frontalière et de voir la violence augmenter à nouveau.
C’est dans ce cadre que les responsables de PAM Sierra Leone, de ceux de la Guinée et Search for Common Ground en collaboration avec les Ministères de l’Administration du territoire, de l’Agriculture et de l’élevage, de la Sécurité et la protection civile, de l’environnement et Budget, ont initié ce projet dont la pose de la première pierre a eu lieu le vendredi 18 février dernier. Ce projet selon eux : « vise à soutenir une relation renforcée entre les gouvernements de Guinée et de Sierra Leone et les communautés en abordant les facteurs sous-jacents communs aux conflits transfrontaliers entre les éleveurs de bétail et les agriculteurs. Cela doit se faire par la résolution collaborative des problèmes et par des approches inclusives de médiation des conflits et de communication transfrontalière ».
Ces différents acteurs souhaitent à travers ce projet l’amélioration des relations transfrontalières qui favorise la coexistence pacifique entre les éleveurs de bétail et les cultivateurs des communautés frontalières du district de Falaba et de la préfecture de Faranah. Aussi, le renforcement de la cohésion sociale, la confiance et la collaboration économique dans le district de Falaba et avec la préfecture de Faranah grâce à l’introduction de moyens de subsistance intelligents face au climat et à la coopération entre éleveurs et agriculteurs. Enfin, l’utilisation des données collectées de la Sierra Leone et de la Guinée pour élaborer des politiques transfrontalières fondées sur des données probantes qui atténuent les conflits.
Pour y arriver, ils ont proposé une stratégie de mise en œuvre qui impliquera les principales parties prenantes au niveau national, des districts/préfectures et des chefferies. Le PAM et l’OIM maintiendront un engagement de haut niveau avec les ministères de l’agriculture et des affaires intérieures pour formaliser les politiques naissantes. Ces politiques seront déployées jusqu’au niveau du district et seront reflétées dans les règlements de la chefferie par le biais d’une approche participative, garantissant une représentation équitable et significative des femmes. L’adhésion de la communauté et l’appropriation du processus resteront au cœur du projet pour atteindre les résultats visés. L’approche communautaire de la médiation des conflits sera facilitée par des consultations avec les principales parties prenantes en utilisant des méthodes et des approches éprouvées de consolidation de la paix.
Les actions recommandées pour prévenir les conflits comprennent des mesures visant à fournir une aide accrue au renforcement des capacités, inclure des questions sur les migrations aux recensements, à mieux utiliser les données administratives, à mener des enquêtes spécialisées sur les migrations et à produire des profils migratoires nationaux. Sur la base de cet engagement mondial, des mesures clés seront prises pour aider les gouvernements de la Sierra Leone et de la Guinée à élaborer des politiques fondées sur de meilleures données et de meilleurs schémas de déplacement. Tandis que l’efficacité accrue des organismes chargés de l’application de la loi se traduira par une plus grande responsabilité et une meilleure réactivité aux besoins des populations locales dans les situations de conflit et/ou de post-conflit.
Oumar M’Böh