Les activités relatives au Fonds du développement économique et local (FODEL) de Dinguiraye, ont été lancées récemment dans cette préfecture. Le démarrage de ces activités a été précédé par un battage médiatique sur la situation du fonds du FODEL suivi d’un mémorandum de l’ensemble des maires de cette préfecture et de marches pacifiques des jeunes de la commune rurale de Banora et de la commune urbaine. Pour en savoir davantage sur la situation qui prévaut dans le cadre de l’évolution sur le terrain, nous avons interrogé, l’un des acteurs majeurs du processus dont la venue à Dinguiraye a fini par calmer les ardeurs. Lisez cet entretien exclusif à bâtons rompus !!!
Lavoixdupeuple.info : Bonsoir Monsieur Soumah, présentez-vous à nos aimables lecteurs.
Ibrahima Sory Soumah : Bonsoir monsieur le journaliste, je suis Ibrahima Sory Soumah marie, chef de département Relations Communautaire du Ministère des Mines et de la Géologie, en même temps je suis l’Assistant du Consultant que le département des Mines a recruté pour opérationnaliser le FODEL dans toutes les préfectures de la Guinée.
Monsieur Soumah, vous êtes actuellement à Dinguiraye, ma préfecture natale, où en sommes-nous avec le fonctionnement du FODEL de cette préfecture qui a fait couler assez d’encre et de salives ?
Merci pour l’invitation, je dirais que le FODEL de Dinguiraye, les choses évoluent à merveille ; c’est vrai qu’à un moment donné nous avons traversé une période un peu chaude qui s’explique par le niveau faible d’informations de la population par rapport aux dispositifs. Mais aujourd’hui, les choses sont rentrées en ordre cela suite à une campagne d’information et sensibilisation que nous avons organisé dans toutes les sous-préfectures, au cours de cette tournée nous avons rencontré toutes les sensibilités notamment les jeunes, les femmes, les acteurs de la société civile, les sages, pour les expliquer comment est-ce que le FODEL est venu à travers un décret du Chef de l’Etat. Ensuite, la clé de répartition par degré d’impact, mais aussi la clé de répartition par entité sociale.
Quelle est cette clé de répartition ?
C’est 20% pour les jeunes, 20% pour les femmes, 21% pour les projets sociaux, 30% pour les projets économiques, le reste pour les projets de renforcement des capacités, ceux liés aux fonctionnements, mais aussi la communication, l’audit et la supervision.
Donc, la population est-elle informée de cette clé de répartition ?
Je répondrai par l’affirmative, car si à un moment donné la jeunesse était mal informé, aujourd’hui, la jeunesse, les femmes, disons toute la population a la bonne information sur le FODEL, qui est un droit pour eux, et chaque année que la CDL (contribution au développement local) est payée par la Société Minière de Dinguiraye (SMD), la jeunesse sait qu’elle a 20% du montant, les femmes également. Aujourd’hui le comité conjoint et le CAGF accompagnent les jeunes et les femmes qui ont été sélectionnés pour cette première année pour mettre en place toute la documentation nécessaire afin qu’ils puissent accéder très vite aux fonds.
Et en ce qui concerne les projets économiques et sociaux ?
Là également le secrétariat permanent est en train d’accompagner les collectivités à travers des techniciens qui sont à la disposition de ces différentes collectivités pour la préparation dans les plus brefs délais des DAO (dossiers d’appels d’offres). Déjà, la commune de Banora a fait la publication de son avis d’appels d’offre, les entrepreneurs sont en train de se procurer des cahiers qui ont été produits, les bouchés doubles vont être mises en œuvre pour que cette semaine les autres communes aussi puissent publier les leurs.
Vous avez parlé du CAGF (comité d’appui technique à la gestion du FODEL) est ce que les membres de ce comité tiennent des réunions de concertation ?
Les membres du CAGF tiennent bien sûr des réunions, mais je ne saurais vous dire la périodicité de ces réunions, c’est monsieur Sékou Oumar Diakité qui en est le président, celui-ci pourra vous donnez plus de détails sur ces rencontres. Moi, je fais un accompagnement technique de manière à ce que toutes les actions qui ont été validées en session budgétaire puissent être préparées et mises en œuvre conformément aux recommandations du comité conjoint à travers la session budgétaire qui s’est tenue ici à Dinguiraye.
Le comité conjoint est composé de combien de membres ?
Le comité conjoint est composé essentiellement des Ministères des Mines et de la Géologie, du Ministère de l’Administration du Territoire et de Décentralisation, donc ce comité est coordonné au niveau opérationnel par le conseiller juridique du Ministère de l’Administration du Territoire. Mais, il ya un arrêté conjoint qui décrit le fonctionnement du comité conjoint. Donc, les deux secrétaires généraux des départements que j’ai cité, coprésident les sessions dudit comité.
Est-ce que vous ne recevez pas de pression ou d’influence de la part du préfet de Dinguiraye, le lieutenant-colonel Mamadou Lamarana Diallo, qui réclamerait être membre dudit comité ?
Non non pas du tout, aussi les préfets ne sont pas membres des comités conjoints. Ce sont des invités. C’est-à-dire qu’au niveau de chaque préfecture où on organise une session budgétaire, les préfets et gouverneurs de régions sont des invités de sessions budgétaires en tant qu’autorités parce que le FODEL est une initiative présidentielle. Donc, étant les garants de l’Etat, ils prennent part à ces sessions pour connaître les recommandations issues de ces sessions et veillez à ce que celles-ci soient mises en œuvre au bénéfice exclusif de la population bénéficiaire. Pour dire qu’ils ne sont pas membres du comité conjoint, même les comptes des communes qui ont été créés dans le cadre du FODEL vous ne verrez nulle part dans aucune des préfectures minières où le préfet est signataire de compte ; il peut désigner les signataires à travers des structures qui sont mises en place.
Merci pour cette mise au point et surtout de cet éclaircissement. Autre question, est ce que les montants des différentes communes ont été disponibilités dans les comptes respectifs de ces communes ? Je vais parler de la commune urbaine et des 7 communes rurales.
Oui, mais la situation de Dinguiraye est un peu spécifique, parce qu’on n’a pas de banques à Dinguiraye ; c’est ça la réalité. Donc, puisque ce sont des fonds publics et ils doivent être domiciliés au niveau de la Banque Centrale de la République de Guinée et comme à Faranah il n’y a pas une Agence de la BCRG là-bas, mais plutôt un guichet domicilié au niveau de la BICIGUI, raison pour laquelle nous avons demandé pour une question d’opérationnalité et de conformité, les comptes des mairies ont été ouverts à Kankan où ils sont partis en compagnie du Receveur central pour les formalités. Etant donné que bien avant le FODEL, les communes disposaient des comptes à la SGBG de Dabola, nous avons fait en sorte que les rubriques de fonctionnement de renforcement de capacités et de communication y soient virés, cela pour permettre aux collectivités de se préparer dans leurs déplacements de préparation des DAO, mais aussi leur épargné d’aller jusqu’à Kankan pour le retrait. En ce qui concerne les projets économiques et sociaux, leurs fonds ont été virés à la BCRG de Kankan.
Actuellement, un séminaire de renforcement de capacités se tient à Dinguiraye. Est-ce que le cabinet a été recruté dans les règles de l’art ? Est-ce que la procédure a été respectée ?
Merci pour cette autre question aussi pertinente. Le recrutement de ce cabinet a fait assez de discussions ici entre les maires et nous. Mais vous savez que le FODEL de Dinguiraye est un peu en retard dans le cadre du démarrage, c’est vrai que le consultant qui est venu est un fils de Dinguiraye et qui a une expertise dans le domaine de la formation, il est également un des vices présidents du Bureau Exécutif du conseil national des organisations de la société civile guinéenne. Effectivement, dans le manuel de procédure, il est prévu des procédures de passation de marchés, et puisque nous sommes dans une situation d’urgence, il faudrait que les choses se passent de manière à aller très vite vers les objectifs. Donc, l’entente directe entre le fournisseur de service et la collectivité qui souhaite avoir un service est bien autorisée par le manuel.
Donc, le manuel de procédure du CAGF n’a pas été violé ?
Non, le manuel de procédure n’a pas été du tout violé. C’est ce qui fait que moi-même je veille à ce que le CAGF ne prenne pas part dans les négociations entre un fournisseur de service et les différentes collectivités. Le CAGF et le comité conjoint sont là en tant qu’observateurs pour voir si les accords entre fournisseurs et localités sont conformes aux procédures du FODEL. Tout en veillant à ce que le fournisseur ne fasse pas de surfacturations par rapport à ses prestations pour des localités qui n’ont pas un certain niveau de connaissance en la matière. C’est pourquoi, le CAGF doit être sûr que les choses se passent dans les règles de l’art.
Est-ce que les membres du secrétariat permanent du CAGF sont payés ? Et quelle est leur durée d’exercice ?
Le secrétariat permanent a un contrat d’une année renouvelable et ses membres sont payés chaque mois. Il s’agit de deux ingénieurs, deux comptables, une assistante administrative et le personnel auxiliaire.
Est-ce qu’on peut avoir une idée sur le montant global, parce qu’on parle de plus de 12 milliards de francs guinéens ?
Je ne dispose pas les documents en face de moi ici, mais le document a été publié sur le net. Et lors de notre tournée dans les localités respectives, partout où nous sommes passés la communication a porté sur le montant qui revient à chaque commune, toutes les composantes sont informées de la situation.
Quel est votre constat par rapport à l’engouement, est ce que l’espoir est permis ?
Je suis très satisfait, parce que moi je n’ai jamais condamné la population de Dinguiraye. Cela compte tenu de la gestion du passé des fonds de la CDL qui était payée à Dinguiraye par la Société et de la manière dont le fonds était géré. Aujourd’hui on a démarré, c’est normal que les populations posent des questions d’éclaircissements afin de mieux comprendre le processus. Donc, c’est dans cette chaleur de revendication qui m’a trouvé du côté de Siguiri, que mon département m’a demandé d’aller à Dinguiraye d’urgence, et lorsque je suis arrivé, j’ai sensibilisé les uns et les autres, ça n’a pas été facile, mais aujourd’hui je suis très satisfait des résultats obtenus sur le terrain et surtout du climat qui prévaut actuellement à Dinguiraye par ce que l’information a été partagée à large échelle, les jeunes et les femmes ont compris ce qui fait que chacun est en train de travailler dans son petit coin pour essayer de valoriser ses droits par rapport au FODEL. Il y’a des groupements qui ont été sélectionnés cette année, ces groupements sont à pied œuvre pour remplir les différents critères, d’autres sont en train eux aussi de s’activer pour la mise en place des documents règlementaires notamment les Statuts et Règlements Intérieurs et les Agréments afin qu’ils puissent bénéficier du FODEL. Aujourd’hui, les populations ont compris que c’est un processus cyclique, ça ne se limite pas seulement en une seule année et quoi qu’il en soit la priorité qui s’impose à Dinguiraye, il y’a une clé de répartition dont 20% pour les jeunes et 20% pour les femmes qui faille respectée et c’est cette information-là qui a beaucoup manquée. Par exemple par le passé le FODEL n’a profité qu’aux entreprises à travers des infrastructures, des équipements…
Monsieur Soumah par rapport à la gestion antérieure que vous venez de décrire, l’on apprend qu’il ya au moins 30 milliards de francs guinéens entre 2015 et 2018 dont les traces ne seraient pas encore retrouvées, qu’en est-il de cette situation ?
En ce qui concerne le département, quand on a interpellé les responsables de la société minière de Dinguiraye (SMD) à faire la situation de rappel de la CDL, on était vraiment surpris de dire que sur le fonds de 2018, il ne restait que deux milliards de francs guinéens (2 000 000 000 GNF), comparativement à Siguiri où on parle de quatre-vingt milliards de francs guinéens (80 000 000 000 GNF) et à Boké plus de quarante milliards (40 000 000 000 GNF). Donc, le département a voulu organiser un audit pour comprendre de 2015 à 2018 les fonds qui ont été décaissés ont servi à quoi et la SMD nous a fourni une liste de dépenses. Et au moment où on s’apprêtait à aller sur le terrain et réaliser l’audit, la pandémie COVID-19 est apparue, on a été freinée par cette situation de crise sanitaire. Raison pour laquelle, nous nous sommes dits qu’au lieu d’attendre l’audit de la gestion antérieure, le peu qui est reconnu il faut démarrer le FODEL de Dinguiraye avec ça d’abord. Donc, c’est pourquoi on a fait un rappel pour l’année 2019 également où on avait 9 milliards plus le reliquat de 2018 qui est de 2 milliards, ce qui nous donne les 12 milliards. En tout cas des dispositions sont envisagées par le département pour essayer de comprendre au clair la gestion antérieure du FODEL de Dinguiraye et le département ira jusqu’au bout.
Ainsi soit-il. Qu’est-ce que vous demandez à la population de Dinguiraye plus particulièrement aux jeunes et aux femmes ?
Ce que je demande aux populations de Dinguiraye particulièrement aux jeunes et aux femmes, je voudrais qu’ils observent les procédures pacifiques de réclamation, parce que les départements ont détaché des personnes ressources dont les contacts ont été rendus publics pour toute information relative aux fonds du FODEL et nous sommes ouverts à toutes les questions, la violence ne rejoue jamais une situation, c’est toujours dans la communication qu’on peut parvenir à une situation profitable à tous.
Merci beaucoup monsieur Soumah Ibrahima d’avoir répondu à nos questions.
Merci beaucoup à vous aussi pour votre intérêt et surtout de votre participation active sur les questions minières de la préfecture de Dinguiraye.
Interview réalisée par Oumar M’Böh pour Lavoixdupeuple
+224 622 624 545