Les deux régimes qui ont gouverné la Guinée ces 30 dernières années ont eu plus de similitudes que de différences. Tous les deux ont été caractérisés par la mauvaise gouvernance qui se manifeste par la mauvaise gestion publique, des atteintes graves aux droits humains dans une atmosphère d’impunité sinon de promotion de l’incurie et du vice.
La classe politique constitue l’acteur majeur de ce douloureux épisode de l’histoire de la Guinée. Ces partis politiques composés pour la plupart d’anciens fonctionnaires de l’Administration étatique ont joué des rôles importants dans cette gestion. A l’exception de quelques-uns, les acteurs politiques ont contribué dans une large mesure à compromettre l’essor politique, social et économique de la Guinée.
Rares sont les leaders de ces partis qui n’ont pas occupé de postes importants dans l’administration publique et par conséquent contribué à la mauvaise gestion, aux détournements des deniers publics, à la corruption érigée en système de gouvernance, à l’affairisme, au clientélisme et à l’impunité.
Ces chantres de la démocratie, de la bonne gouvernance, du respect des droits humains et du développement ne sont autres que les artisans, concepteurs et promoteurs de la dictature, la mauvaise gouvernance, de la violation des droits des guinéens et donc de la pauvreté.
En 2009, ce sont les forces vives qui avaient organisé les manifestations qui ont couté la vie et la dignité à un nombre important de guinéens au stade du 28 septembre. Tout porte à croire qu’ils sont plus préoccupés aujourd’hui par les élections à venir que de réclamer justice et réparation pour ces nombreuses victimes et leurs familles qui attendent encore.
Ils étaient nombreux qui ont géré avec Conté et nombreux encore qui étaient autour de Condé, entrant et sortant des mouvances au gré de leurs intérêts égoïstes et partisans.
La démocratie, qui pour eux ne se résume qu’à un citoyen est égal à un vote et l’alternance au pouvoir, a toujours été le dernier de leurs préoccupations. La preuve en est qu’ils dénoncent ou justifient les violations des droits humains qu’en fonction de leurs intérêts personnels.
Pour les mêmes leaders qui promettent le paradis une fois élus, les morts pendant les manifestations étaient allés d’eux-mêmes à l’abattoir, lorsqu’ils étaient du côté du pouvoir ; maintenant on reconnait encore les mêmes visages et les mêmes voix condamner et réclamer justice pour Thierno Mamadou Diallo. Les convictions et les valeurs ne sont que des bonnets qu’on porte selon le temps qu’il fait.
Pendant que le peuple subissait la répression lors de la lutte contre le troisième mandat, certains de nos champions de politiques pensaient que seul Alpha Condé était à mesure de gouverner, et demandaient du temps pour qu’il achève ses grands chantiers de développement. Ce sont les mêmes qui aujourd’hui qui brandissent des manifestations de rue pour réclamer un retour à l’ordre constitutionnel!
Les violences subies par les populations à l’époque étaient pour eux des dommages collatéraux d’une lutte légitime puisque protégeant les intérêts de la nation sic !
La seule chose qui compte pour la plupart est d’arriver à la mangeoire, la pauvreté des populations, le chômage des jeunes, les dénis de justice, les violations des droits des citoyens et l’entorse à la démocratie et à l’Etat de droit peuvent attendre.
Il est important que des mesures soient prises d’urgence pour que les conditions d’organisation d’un retour à l’ordre constitutionnel soient réunies dans la responsabilité et la sérénité pour éviter de revivre les travers du passé. La durée de la transition doit être raisonnable pour que du travail sérieux soit effectué et que la précipitation ne nous mène pas encore vers des simulacres d’élections et leurs conséquences fâcheuses.
C’est en cela que la CEDEAO et les partenaires devraient aider la Guinée, s’ils veulent faire du sérieux.
L’expérience nous a appris que la légitimité est le seul gage durable d’autorité. La Guinée n’est pas ingouvernable, au contraire, il suffit que le suffrage exprimé par le peuple soit respecté et que les efforts des dirigeants soient conformes aux promesses de campagnes et répondent aux préoccupations légitimes des populations. Ce n’est pas en exerçant, à mon avis, des pressions parfois démesurées sur la junte que nous arriverons à garantir ce retour souhaité à l’autorité de la loi.
Le peuple doit être vigilant et déterminé à défendre ses droits pour nous éviter le retour des vautours au pouvoir. C’est enfin lui qui en sera le gagnant ou le perdant.
Boubacar DIENG