Les régimes de l’Alliance des États du Sahel (AES) le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont jugé le vendredi 13 décembre 2024 ‘’irréversible’’, leur décision de quitter la Communauté Economique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), à deux jours d’un Sommet de cette dernière sur le sujet à Abuja (Nigeria).
Ces trois pays gouvernés par des juntes militaires hostiles à la France ont annoncé fin janvier 2024 leur volonté de quitter la CEDEAO, une organisation qu’ils jugent notamment ‘instrumentalisée par Paris’ et qui espérait jusqu’ici les faire revenir sur leur décision.
Du berger à la bergère, la CEDAO a acté la sortie du Mali, le Burkina Faso et le Niger, de l’organisation à la faveur du sommet extraordinaire tenu le dimanche, 15 décembre 2024 à Abusa au Nigéria. Les Chefs d’État de la CEDEAO ont pris acte de l’intention des pays de l’AES de quitter l’organisation ouest-africaine. Une période de transition de six (06) mois va s’ouvrir à partir du 29 janvier, à l’issue de laquelle, soit en fin juillet, la sortie des trois (03) États sahéliens de la CEDEAO sera définitive.
Face à cette crise, le président de l’Institut panafricain de stratégies, Cheikh Tidiane Gadio ancien chef de la diplomatie et député sénégalais et personnalité politique panafricaniste dans l’âme, s’oppose à cette décision de retrait de ces trois pays à la CEDEAO. Il l’a fait savoir, le mercredi 18 décembre 2024, à Dakar, à l’occasion du lancement officiel de la 6ème édition du forum du Mouvement Panafricain des Leaders (MPL).
Selon lui : « La question du retrait de l’AES à la CEDEAO, est une question douloureuse et les réponses que nous avons actuellement ne nous conviennent pas. Pour nous, la rupture définitive entre le Mali, le Burkina et le Niger d’une part et le reste de la CEDEAO, ce n’est pas une option pour nous. Ce n’est pas une option pour nous. Ça prendra le temps qu’il faut pour penser les blessures, régler les problèmes, mais nous allons rester ensemble. Nous avons un acquis, ces 15 pays d’Afrique qui ont construit ensemble la CEDEAO. La CEDEAO me semble-t-il, comme l’avait prédit Cheikh Anta Diop en 1975, la CEDEAO, à sa naissance donc, la CEDEAO a atteint ses limites historiques. Parce que la CEDEAO maintenant, elle devait faire un pas gigantesque vers l’État fédéral ouest-africain. Parce qu’on ne l’a pas fait, parce que les contradictions se sont accumulées, parce que les problèmes de gouvernance se sont accumulés et les autres États ont attaqué, soi-disant, les États putschistes. C’est vrai que c’est des militaires putschistes qui ont pris le pouvoir dans ces trois États. Mais en même temps, et les coups d’État, les autres formes de coups d’État, comme j’ai dit, constitutionnels, coups d’État électoraux, etc. les problèmes de la gouvernance en Afrique ne se limitent pas à la question des coups d’État militaires. Donc, rien ne nous empêche d’organiser les assises de la gouvernance en Afrique, les assises historiques. Si on ne peut pas le faire au plan continental, au moins au plan régional, au lieu de convoquer un sommet de la CEDEAO, pour constater qu’il y a trois pays qui veulent partir, il faut appeler un sommet ou des assises historiques de la gouvernance en Afrique. Et qu’en Afrique de l’Ouest, on se parle, que les militaires entrent dans la salle, qu’ils viennent parler, que les civils viennent parler, qu’on se réconcilie d’abord, on réconcilie les cœurs et les esprits, et on va rester ensemble » a-t-il proposé.
Mais l’ancien ministre des Affaires étrangères ne s’est pas limité à ça. Il a par ailleurs dit que : « Pour moi, il est hors de question d’accepter que des pays africains, trois pays sortent de l’ensemble. C’est une défaite pour nous. Et nous ne sommes pas pour les défaites, nous sommes pour les victoires. Cheikh Anta Diop aurait souhaité qu’on ait les États-Unis d’Afrique de l’Ouest, au lieu d’avoir les États divisés de l’Afrique de l’Ouest, balkanisés en plusieurs morceaux, et ensuite divisés en associations des États du Sahel, et ensuite en associations des autres. Il est urgent de comprendre que l’Afrique n’a plus le choix. Le temps court contre nous, que tout le monde s’organise. L’Inde qui était un pays du tiers-monde avec plein de difficultés, l’Inde est aujourd’hui dans le peloton de tête. La Chine est dans le peloton de tête. Qu’est-ce que l’Afrique attend pour s’unir ? Créer l’État fédéral africain, au niveau régional ou au niveau continental. Les divisions ne marchent pas » a-t-il ajouté.
La question qui taraude les esprits est de savoir si cette proposition exceptionnelle de l’ancien ministre sera-t-elle prise en compte par les chefs d’états de la CEDEAO ?
Dakar, Oumar M’Böh pour www.lavoixdupeuple.info