Les États membres de l’ONU se sont engagés ce dimanche 22 septembre 2024 à dessiner « un avenir meilleur » pour l’humanité éprouvée par les guerres, la misère et le réchauffement climatique, malgré l’opposition d’une poignée de pays dont la Russie à l’adoption de ce « Pacte pour l’avenir ».
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres avait lancé en 2021 l’idée de ce « Sommet de l’avenir » présenté comme une « occasion unique » de changer le cours de l’Histoire de l’humanité.
En prélude à la grand-messe annuelle de l’Assemblée générale de l’ONU à partir de mardi, des dizaines de chefs d’État et de gouvernement sont attendus dimanche et lundi pour ce Sommet.
Après d’âpres négociations jusqu’au dernier moment, la Russie a affiché dimanche son opposition au texte, sans toutefois empêcher son adoption par consensus.
« Cela ne peut pas être considéré comme du multilatéralisme », « personne n’est content de ce texte », a déclaré le ministre russe adjoint des Affaires étrangères Sergueï Verchinine.
La Russie, soutenue par le Bélarus, l’Iran, la Corée du Nord, le Nicaragua et la Syrie, a voulu présenter un amendement affirmant que l’ONU « ne peut pas intervenir » dans les affaires « internes » des États, mais la grande majorité de l’Assemblée a refusé de prendre en compte cette proposition.
Avant le sommet, Antonio Guterres avait laissé transparaître une certaine frustration sur le contenu du texte, appelant les États à faire preuve de « vision » et de « courage », ou encore d’une « ambition maximale » pour renforcer des institutions internationales « obsolètes » qui ne sont plus capables de répondre efficacement aux menaces d’aujourd’hui.
Dans le Pacte, les dirigeants s’engagent à renforcer le système multilatéral « pour suivre le rythme d’un monde qui change », « protéger les besoins et les intérêts des générations actuelles et futures » menacées par des « crises continuelles ». « Nous croyons qu’il y a un chemin vers un avenir meilleur pour toute l’humanité. »
Le Pacte présente sur plus de 20 pages 56 « actions » dans des domaines allant de l’importance du multilatéralisme au respect de la charte de l’ONU et au maintien de la paix, de la réforme des institutions financières internationales à celle du Conseil de sécurité de l’ONU, ou encore la lutte contre le changement climatique, le désarmement et le développement de l’intelligence artificielle.
– « Eau tiède » –
Même s’il y a quelques « bonnes idées », « ce n’est pas le type de document révolutionnaire réformant totalement le multilatéralisme qu’Antonio Guterres avait appelé de ses vœux », avait déclaré à l’AFP avant l’adoption Richard Gowan, de l’International Crisis Group.
Un avis plutôt partagé parmi les diplomates dont beaucoup levaient les yeux au ciel quand ils étaient interrogés sur l’ambition du texte et son impact.
« De l’eau tiède », « le plus petit dénominateur commun », « décevant »… « Idéalement, on aurait espéré de nouvelles idées, des idées 2.0. Mais quand vous avez près de 200 pays qui doivent se mettre d’accord, ça ressemble à un sapin de Noël », notait un diplomate.
La lutte contre le réchauffement a été un des points délicats des négociations, la référence à la « transition » pour sortir des énergies fossiles ayant disparu du projet de texte pendant plusieurs semaines.
Malgré les critiques et même s’il ne faut pas s’attendre à ce que ce « Pacte » crée la paix « du jour au lendemain », c’est « une opportunité d’affirmer notre engagement collectif envers le multilatéralisme, en dépit du contexte géopolitique actuel difficile », estime toutefois un diplomate occidental, insistant sur l’espoir de renforcer ainsi la confiance entre le Nord et le Sud.
Les pays en développement réclamaient en particulier des engagements concrets sur une réforme des institutions financières internationales, pour faciliter l’accès de certains d’entre eux à des financements préférentiels pour faire face notamment aux impacts du changement climatique.
Le projet comporte d’ailleurs certains « engagements importants » en la matière, a commenté Human Rights Watch, saluant également des éléments sur « la centralité des droits humains ».
Mais « les dirigeants mondiaux doivent donner la preuve qu’ils sont prêts à agir pour faire respecter les droits humains », a insisté Louis Charbonneau, expert ONU de l’ONG.
Quel que soit son contenu, le « Pacte » et ses annexes (Pacte numérique mondial et Déclaration pour les générations futures) sont en effet non contraignants, soulevant la question de leur mise en œuvre alors que certains des principes mis en avant, comme la protection des civils dans les conflits, sont violés quotidiennement.