L’affaire défraie la chronique dans la cité depuis que le CNT, en séance plénière du mardi 26 septembre 2023, en procédant à la clôture de l’examen du Projet de loi de finances rectificative de l’année, a révélé l’information selon laquelle, l’Etat paie par an 21 milliards de francs guinéens pour la location du bâtiment abritant la Cour des Comptes et l’ex-Cour Constitutionnelle. Avant l’approbation de cette importante loi de finance, les membres du CNT ont fouillé systématiquement et examiné minutieusement le bottin avant d’aboutir à des constats et recommandations pertinents pour la mobilisation et l’utilisation du budget de l’Etat.
Dans son rapport de circonstance, le Parlement de la transition, le CNT, a constaté que le loyer des bâtiments abritant certains services de l’Etat coûte très chers au contribuable. D’ailleurs cet argent dépensé par an aurait pu aider à construire des sièges dignes de ce nom à ces services et institutions de l’Etat.
Dans ce document présenté lors de la plénière, le CNT a fait savoir qu’à la suite des interrogations soulevées et des réponses apportées par les représentants du Gouvernement, des constats assortis de recommandations spécifiques ont été formulés ainsi qu’il suit :
« Les charges de location des bâtiments abritant certains services publics absorbent d’importantes ressources financières. A titre d’illustration, la Cour des Comptes paie 823 443 598 GNF et la Cour Suprême (ex Cour Constitutionnelle) 916 666 666 GNF par mois soit près de 21 Mds par an pour un même bâtiment. Pour corriger cette importante saignée financière, le CNT recommande la construction de locaux pour ces services. En attendant cette construction, il invite le Gouvernement à renégocier à la baisse ces contrats de location ».
Interloqué par cette dénonciation, un journaliste de votre quotidien « La Voix du peuple », s’est penché sur le dossier et a réussi à identifier le propriétaire de cet immeuble qui abrite la Cour des comptes et l’ex-Cour Constitutionnelle, ce vendredi 27 septembre 2023.
Il ressort que ce n’est pas le seul immeuble qui est concerné par cette situation, du reste rocambolesque et surprenante, pour celui qui sait la volonté des autorités de la transition de finir avec les anciennes pratiques qui ont mis ce pays à genou et ruiné ses ressources financières au profit d’une poignée de personnes.
Au vrai sens du mot, que s’est-il passé ? Cet immeuble de l’homme d’affaires Kerfalla Person Camara dit KPC, est-il le seul à être loué par l’Etat ? Comment il a été évalué et comment se fait le paiement et avec qui ? Voilà autant de questions que notre reporter a posées à l’homme d’affaires, actuellement en séjour à l’étranger.
Dans cet entretien téléphonique et exclusif, « La Voix du peuple », vous livre le contenu de la première partie. D’entrée, KPC y voit un complot ourdi par ses détracteurs tapis au CNT et qui souhaitent nuire à ses intérêts :
« Le bâtiment est un immeuble de 10 étages. Donc il a 10 paliers. Et chaque palier comprend 4 appartements. Effectivement ce loyer est payé à 21 milliards de francs guinéens par an. Cela fait juste 2 millions de dollars. Mais il n’y a pas que les locaux qui sont rémunérés. Il y a la prestation aussi. C’est-à-dire la sécurité de l’immeuble, l’approvisionnement en eau potable, l’électricité, les meubles, l’assainissement et même l’internet. C’est tout cela qui est donné à ce montant, qui est moins cher que tous les autres », dit-il.
D’ailleurs pour lui, la plupart de ses contrats avec l’Etat, puisqu’il s’agit de plusieurs ont été directement discutés avec l’ancien Président Alpha CONDÉ.
« Moi, mes contrats, la plupart, je les discute directement avec le Président Alpha CONDÉ. Parfois, on m’avance si l’Etat a les possibilités. Et parfois, il consomme avant de payer. J’ai même demandé à ce qu’on me paie cinq à six ans pour que je donne les bâtiments à l’Etat », a-t-il révélé.
L’homme d’affaires affirme que depuis l’arrivée du CNRD aux affaires, ils ont libéré plusieurs de ses bâtiments.
« Ils ont libéré trois de mes bâtiments. Ils ont libéré là où il y avait le Conseil économique, social et environnemental, le bâtiment qui se trouve à côté du gouvernorat et celui du ministère de l’assainissement et de l’hydraulique », a souligné le patron (de la Guinéenne de construction et de prestation), GUICOPRES S.A.
KPC jure que c’est quelqu’un qui n’aime pas sa tête qui est allé au CNT et trouver ses amis pour mettre ses bâtiments en premières lignes de dénonciation.
« Je m’en fous, cela me va au pôle Nord…Sinon il y a les bâtiments des autres. Comme les Libanais qui sont plus chers que moi et que l’Etat loue ».
Comme on le voit, la saigné financière de l’Etat, une pratique contre laquelle, les autorités de la transition, à leur tête le Colonel Mamadi Doumbouya, ont décidé de combattre avec toute leur énergie et d’y mettre fin, ne concerne pas que cet immeuble abritant les services de l’Etat. Nos enquêtes se poursuivent pour d’autres révélations plus croustillantes.
Oumar M’Böh