(Agence Ecofin) – Le World Government Summit s’est achevé jeudi 13 février à Dubaï. Quelques jours avant sa participation au sommet des chefs d’États et de gouvernement de l’Union africaine à Addis-Abeba, Andry Rajoelina s’est rendu aux Émirats arabes unis pour échanger avec des leaders mondiaux. À cette rencontre, le président malgache a notamment fait état des progrès de son pays en matière de développement du secteur agricole et de sécurité alimentaire.
Composée d’une dizaine de ministres et de hauts cadres de l’administration, la délégation malgache au World Government Summit a mené des échanges relatifs au tourisme, à l’efficacité énergétique et au climat. Dans l’une de ses interventions, Andry Rajoelina a réaffirmé l’engagement de son gouvernement à faire de l’agriculture, qui fait vivre déjà 80 % de la population malgache, le principal levier de développement de la Grande Ile. Pour le chef d’État, l’enjeu n’est pas seulement d’assurer la croissance économique, mais aussi de garantir la souveraineté alimentaire du pays, car dit-il, « un bon président est celui qui sait nourrir sa population ».
Madagascar, grenier à riz de l’Afrique
Pour atteindre la sécurité alimentaire et engager pleinement le pays sur la voie du développement, le gouvernement fonde de grands espoirs sur la filière rizicole. Madagascar est déjà le troisième producteur africain de riz, derrière l’Égypte et le Nigeria, qui couvrent près de deux fois la superficie de la grande île.
Madagascar est déjà le troisième producteur africain de riz, derrière l’Égypte et le Nigeria, qui couvrent près de deux fois la superficie de la grande île.
D’après la FAO, le pays a produit 3,2 millions de tonnes de riz en 2023/2024, pour des besoins nationaux estimés à 3,7 millions de tonnes. En comparaison, le Nigeria a produit 5,3 millions de tonnes de riz sur la même campagne, contre 3,8 millions de tonnes pour l’Égypte.
Alors que l’Afrique représente plus de 30 % des importations mondiales de riz, des opportunités sont à saisir pour les producteurs locaux. Pour faire de Madagascar le « grenier rizicole du continent africain », selon les déclarations faites à Dubaï par le président Rajoelina, le gouvernement veut augmenter les surfaces couvertes et la productivité du secteur. La riziculture occuperait actuellement 2 millions d’hectares sur l’île, là où il existe encore 36 millions d’hectares de terres arables.
La riziculture occuperait actuellement 2 millions d’hectares sur l’île, là où il existe encore 36 millions d’hectares de terres arables.
Dès 2025, Madagascar ambitionne de cultiver 100 000 hectares supplémentaires de riz, ce qui permettrait d’ajouter 1 million de tonnes à la production de la campagne écoulée. Le gouvernement prévoit aussi d’allouer cette année 573 milliards d’ariarys (122 millions $) à l’achat de semences de riz hybride. « En modernisant les pratiques agricoles à travers la mécanisation, en utilisant les semences améliorées et les dernières technologies, nous pouvons tripler le rendement jusqu’à 9 à 12 tonnes à l’hectare, alors qu’actuellement, le rendement rizicole moyen à Madagascar est de seulement 3 tonnes à l’hectare », a déclaré le président.
Une fois l’autosuffisance alimentaire atteinte à l’horizon 2026, le pays pourra ensuite s’attaquer au marché africain. D’après un rapport de OCDE-FAO, la part de l’Afrique dans les importations mondiales de riz devrait atteindre 41 %, ce qui donne la possibilité aux pays africains autosuffisants de vendre leur excédent sur le continent.
Déficit de financement et changement climatique
Le gouvernement malgache a mis en place un Pacte sur la souveraineté alimentaire et la résilience, qui prévoit d’accélérer le développement de quatre filières dans l’agriculture. Si le riz occupe une place centrale, les autorités cherchent aussi à faire progresser la production de maïs, de manioc et d’oléagineux (soja et arachide). Selon un rapport de la Banque africaine de développement publié en février 2023, le gouvernement veut porter la production à 821 600 tonnes de maïs en 2028, contre 267 633 tonnes en 2022. La production de manioc passerait de 3 millions de tonnes à 5,7 millions de tonnes en 2028, alors que la production de riz atteindrait 8,8 millions de tonnes.
D’après la FAO, le pays a produit 3,2 millions de tonnes de riz en 2023/2024, pour des besoins nationaux estimés à 3,7 millions de tonnes.
Pour atteindre ces objectifs, les investissements à mobiliser sont estimés à 3,11 milliards de dollars. Le gouvernement s’engage à investir au moins 10% de son budget dans le secteur de l’agriculture, l’élevage et la pêche, pendant les cinq prochaines années au moins, ce qui représente un total de 350 millions de dollars. Malgré cet engagement, la BAD estime qu’un gap de financement de 2,11 milliards de dollars reste à combler.
Reste qu’au-delà des investissements à mobiliser dans le secteur agricole, Madagascar est particulièrement exposé aux chocs climatiques. Dans un rapport de 2023, le FMI indique que 8,8 millions de personnes, soit 33 % de la population, souffrent d’insécurité alimentaire. Cinq millions d’habitants sont affectés par des catastrophes naturelles récurrentes, et la malnutrition chronique touche 40 % des enfants. La déforestation, l’érosion et la faible résilience des infrastructures aggravent les pertes agricoles et réduisent la capacité de réponse aux crises alimentaires.
Face à ces défis, le gouvernement mise sur des infrastructures d’irrigation, des variétés de semences plus résistantes et des stratégies d’adaptation pour minimiser les pertes et renforcer la résilience des communautés rurales.
Toutefois, ces mesures nécessitent des investissements conséquents, venant s’ajouter aux besoins de financement déjà identifiés pour le développement agricole. Ce défi budgétaire souligne la nécessité de partenariats et de financements externes afin de garantir la viabilité de ces initiatives et d’assurer une sécurité alimentaire durable pour Madagascar.
Source: www.agenceecofin.com