Un an après son apparition, le coronavirus continue de faire chaque jour des milliers de morts et d’aggraver la pauvreté dans le monde. Lors d’une journée spéciale ce lundi 11 janvier, RFI analyse les dernières avancées scientifiques et les changements profonds que cette crise a installé dans nos vies quotidiennes.
Confinement, gestes barrière, distanciation sociale, hydroxychloroquine, cluster, écouvillon, zoonose : autant de mots ou d’expressions dont nous n’avions pas connaissance ou du moins pas l’usage il y a seulement un an, lorsque le monde commence à découvrir une maladie inconnue et qui à l’époque n’inquiète pas grand monde. Le 5 janvier 2020, l’Agence France Presse diffuse une dépêche qui intrigue les spécialistes des épidémies : « Mystérieuse pneumonie en Chine: 59 cas, le SRAS exclu ».
Identifiée quelques jours auparavant à Wuhan (centre du pays), cette maladie à coronavirus que l’on appellera Covid-19 se répand dans cette ville de 11 millions d’habitants, d’abord parmi les personnes qui fréquentent un marché aux poissons et animaux sauvages. On ne parle pas encore de transmissions entre humains. Les autorités chinoises et l’OMS (Organisation mondiale de la santé) donnent la première alerte et le 11 janvier est annoncé un premier décès : celui d’un Chinois de 61 ans habitué du marché de Wuhan et qui avait déjà des problèmes de santé.
Ennemi invisible
Paradoxes économiques
Mais ce sont en réalité les économies dans leur ensemble qui subissent un choc tout aussi violent qu’imprévisible. La fermeture des frontières, les confinements à répétition et qui se prolongent pendant des mois, l’activité à l’arrêt dans de nombreux secteurs : au nom de la préservation de la vie humaine, une crise profonde s’est installée. Privées de ressources, des entreprises mettent la clé sous la porte, plongeant leurs salariés dans l’incertitude. Le secteur informel paie un plus grand prix encore. La Banque mondiale prévoit qu’en 2021, 150 millions de personnes pourraient plonger dans la grande pauvreté du fait de la récession. Les inégalités sociales, déjà flagrantes, se creusent dans de nombreux pays où les distributions de nourriture et de biens de première nécessité voient les files d’attente s’allonger.
Un vainqueur dans la course au vaccin
Et puisqu’il en fallait un, ce sera lui : l’Américain Pfizer, associé au laboratoire allemand BioNTech, remporte un sprint inédit dans l’histoire de la recherche sur les épidémies. Dès le mois de novembre (8 mois seulement après que l’OMS a décrété la pandémie), son PDG Albert Bourla annonce la mise au point d’un vaccin « efficace à 90% ». Les marchés financiers s’enthousiasment et les gouvernements se livrent bataille pour réserver des stocks. Une semaine plus tard, c’est un autre groupe américain, Moderna, qui fait monter les enchères en promettant un vaccin efficace « à 95 % ». D’après les premières constatations, les effets indésirables sont mineurs. D’autres sont également lancés comme le Britannique AstraZeneca, le Chinois Sinopharm, le Russe Spoutnik, l’Américain Novavax.
Les premières campagnes de vaccination ont donc débuté, notamment dans les pays occidentaux, avec une priorité accordée aux personnes âgées, personnels soignants, les catégories de population les plus vulnérables. C’est la clé d’un possible retour à une vie un peu plus normale, espérée dans le courant de l’année 2021. Restent plusieurs questions : les pays les moins riches seront-ils rapidement approvisionnés ? Les vaccins chinois et russes, moins onéreux, pourraient être privilégiés en Afrique et en Amérique latine. Par ailleurs, comment convaincre les anti-vaccins, réticents à la piqûre pour des raisons médicales ou idéologiques ? Le défi est aussi politique et sociétal, dans un monde où la science est de plus en plus remise en cause.
Des armes pour lutter
Le vaccin, quoique probablement décisif, n’est pourtant pas la seule arme dont dispose le monde en 2021. Le traçage des personnes contaminées est un enjeu stratégique. Tout comme le respect des gestes barrières qui se sont invités sans doute pour longtemps dans nos existences. Pour reprendre une image éloignée de la science, mais véhiculée par des scientifiques, ces mesures sont comme une suite de tranches d’emmental, ce fromage avec des trous aléatoires ; chacune de ces mesures n’est pas suffisante à elle seule pour faire obstacle au coronavirus, mais, ensemble, elles constituent un rempart efficace. Il y a d’abord le masque ; un accessoire, qui est très loin d’être accessoire, avec lequel nous avons appris à vivre pour l’immense majorité d’entre nous. Il est fondamental. Et ce d’autant que l’on peut être contagieux sans avoir de symptômes du Covid-19. Autre geste très important : l’aération des lieux clos. Parler, tousser, éternuer mais aussi respirer provoquent l’émission de gouttelettes potentiellement contaminées – à noter que les plus petites peuvent rester plusieurs heures en suspension dans l’air. Il ne faut pas oublier le lavage très régulier des mains au savon, ou l’utilisation du gel hydro-alcoolique. Autant de gestes de base préconisés par les spécialistes de santé publique.
Mais ce qui aura sans doute davantage marqué les terriens et va sans doute les marquer pour un bon moment, c’est la recommandation d’une distanciation physique, arme encore plus imparable que le port du masque. Le fait de réduire drastiquement les contacts induit mécaniquement moins de cas. Sauf que demander à des êtres humains, théoriquement programmés pour le lien social, de ne plus se serrer la main, ne plus se toucher, s’embrasser, ne plus danser ensemble, ne plus manger à la même table, parfois même de s’isoler totalement pendant plusieurs semaines est par nature source d’angoisses voire de dérèglements psychologiques. Des écoles et des universités fermées (avec des conséquences inévitables sur le niveau d’éducation des enfants), des salariés qui travaillent à leur domicile parfois exigu et donc privés d’une partie de la relation humaine avec leurs collègues, la pratique sportive limitée, les voyages quasi-impossibles, les lieux de socialisation comme les bars et les restaurants désertés, l’annulation des spectacles culturels, des fêtes familiales ou amicales, la limitation drastique de la pratique religieuse : autant de facteurs de fragilisation de la santé mentale dans toutes les générations. Une attention est portée aux étudiants et aux jeunes adultes privés des moments qui forgent leur personnalité et leurs amitiés futures. C’est le moment où se dessine leur rapport au monde.
Des motifs d’espoir
Un tableau très sombre, mais il y a aussi des raisons d’être raisonnablement optimiste pour l’avenir à moyen terme. En attendant les effets des vaccins et d’une possible immunité collective, en attendant la mise au point de traitements efficaces contre ce virus, cette crise aura aussi fait émerger de nouvelles solidarités, y compris internationales. Des projets sont en route, de nouvelles façons de travailler sont imaginées, d’autres façons d’enseigner, certains veulent croire aussi à une prise de conscience écologique, une autre façon de penser notre rapport à la consommation, une autre relation au monde animal. Des perspectives plus joyeuses qui, sans consoler les malades, leurs familles, ou ceux qui ont perdu leur emploi, permettent au moins de poser la question : « Et si 2021 nous laissait apercevoir le bout du tunnel ? »
Source: Seneweb