Il était annoncé sans que personne ne parie sérieusement sur son arrivée. Mais on ne pouvait nullement en douter, au regard des dispositions qui ont été prises par les émissaires qui ont pris en otage la ville sainte de Kankan, des jours avant.
Trêve de doute et d’incertitude, arrive le colosse du palais Mohamed 5. On était en fin de matinée, ce mardi 27 juin 2023.
La nouvelle qui a surpris plus d’un à Kankan, c’est que le Président est arrivé par voie routière. Personne ne le savait. L’information a été bien gardée. Ce régime militaire fait mieux dans la discrétion, que celui qui l’a précédé dont les secrets étaient les moins gardés.
Cette audace d’arpenter la route et parcourir plus de 600 km, la distance qui sépare Kankan de Conakry, est sans doute dictée par le bon état de ce tronçon rendu trop bien praticable.
A Kankan, le défi pour le parrain O+ et ses émissaires, ces directeurs massivement mobilisés, mais inaudibles, c’était de mobiliser. Faire de l’événement le plus marquant de l’histoire de la ville. Ce pari, il fallait encore des efforts. Redoubler l’effort de sensibilisation qu’il y a eu la veille en direction des jeunes dit leaders. Redoubler l’effort de propagande dans les rues, haut-parleurs accrochés sur les véhicules paradant à travers la ville avec des messages plus ou moins digestes. Aussi, distribuer plus d’argent comme c’est d’ailleurs une tradition en pareils cas. Bref tout cela a été fait par la commission d’organisation improvisée, à sa tête le très bruyant Apache, président de la Chambre d’agriculture. Celui-ci a pu compter, dans ce rôle de débauche d’énergie et de propagande, sur les DG de SNIES (Moud), OGP (Mandian), Patrimoine bâti (Ouattara) et le secrétaire général du ministère des sports, un ancien employé d’hôtel à Paris, reconverti en administrateur de haut niveau (sic).
Les ministres par contre, Mory Condé et Nagnalen s’occupaient des détails bien plus sérieux et y sont parvenus sans défaillance. C’était les contacts souverains, la sécurité, l’assainissement de la ville et le relooking de la résidence qui doit accueillir l’hôte de marque.
Le parrain, drapé dans les couleurs nationales a été accueilli à la rentrée de la ville, à quelques kilomètres.
Debout dans son véhicule de commandement, accompagné d’une forêt de militaires de la garde présidentielle et de véhicules assez trop nombreux, formant une file de plusieurs centaines de mètres, le cortège s’est ébranlé vers la ville, avec du monde de part et d’autre de la ville.
« Il y a eu du monde, mais certainement pas assez, essentiellement des badauds. Il y avait trop peu de personnes qui se sont déplacées pour ça », se moquent des militants du RPG, restés indifférents et réitérant ainsi leur désamour pour leur compatriote de président.
« On n’a pas boycotté, parce que c’est un président, mieux un natif de la ville, mais on ne s’est pas mobilisé, on n’en a rien à foutre avec un régime qui s’en fout de personne », a renchéri un autre groupe de mécontents, réunis nombreux au tour du thé dans des quartiers.
Dans le camp présidentiel, on est d’un enthousiasme prudent, révélateur d’une insatisfaction. En témoigne la publication du DG de l’OGP, Mandian Sidibé, qui n’a pas lésiné sur les moyens financiers pour accomplir, mais en vain, un idéal. Dans cette publication, Mandian Sidibé déplore en substance que la mobilisation ait été aussi moindre.
Pour dire tout vrai, Kankan n’a pas boycotté son fils, mais n’a pas non plus fait de son retour dans sa ville natale depuis son avènement au pouvoir un évènement qui devrait mettre un trait sur toutes les mobilisations précédentes.
Pour la suite du séjour, nous y reviendrons !
Depuis Kankan, Mognouma Cissé