Le rapport souligne qu’en Guinée, les disparités entre les préfectures minières et les zones dépourvues d’activités extractives en matière de prévalence de la pauvreté et d’accès aux infrastructures reflète un problème structurel persistant dans la redistribution des richesses, malgré plusieurs initiatives prises ces dernières années par le gouvernement.
Les populations guinéennes vivant à proximité des sites miniers sont plus confrontées à la pauvreté sévère et au manque de services publics et d’infrastructures, comme l’eau potable et les soins médicaux, que les communautés installées dans les zones non minières, selon un rapport publié le lundi 23 décembre 2024 par le réseau panafricain de recherche, Afrobarometer.
Intitulé « En Guinée, les populations riveraines des zones minières ne sont pas forcément les mieux loties », le document rappelle que le pays mise sur l’exploitation de ses vastes ressources naturelles pour améliorer les conditions de vie des populations riveraines des zones minières à travers plusieurs initiatives. Le Fonds de développement local (FDL) prévoit depuis 2017 que 0,5% à 1% du chiffre d’affaires des entreprises minières soit alloué aux communautés directement impactées et vivant à proximité des sites d’exploitation minière. Aussi, conformément au Code minier adopté en 2011, 15% des revenus miniers nationaux sont réservés au financement des collectivités locales afin de promouvoir un développement inclusif.
Le rapport, qui se base sur une enquête réalisée auprès de 1200 adultes guinéens dans la plupart des préfectures du pays, montre cependant que 55% des habitants des zones minières sont en situation de pauvreté sévère contre 47% de ceux vivant dans les zones non minières.
L’expérience de pauvreté sévère étant le résultat des situations de manque fréquent de besoins de première nécessité, les riverains des zones minières sont plus nombreux à se plaindre sur trois sur cinq de ces besoins. Plus que leurs homologues vivant hors zone minière, ils ont « plusieurs fois » ou « toujours » manqué de revenus en espèces (78% contre 64%), de médicaments ou de soins médicaux (52% contre 42%) et d’eau potable (48% contre 34%) au cours des douze derniers mois.
Les Guinéens qui résident dans les préfectures minières ont également moins accès aux services et infrastructures tels qu’un réseau électrique (31% contre 48%), un système d’adduction d’eau (14% contre 27%), un système d’évacuation des eaux usées (10% contre 26%), une école (82% contre 97%) et un centre de santé (56% contre 64%).
Des revenus inéquitablement redistribués
Cette situation pourrait s’expliquer en partie par le fait que les revenus sont souvent centralisés à l’échelle nationale et inéquitablement redistribués, ce qui empêche le développement d’infrastructures et de services publics essentiels. En outre, les entreprises minières ne respectent pas toujours leurs obligations d’investir dans le développement local en construisant et réhabilitant les infrastructures essentielles.
Quant à la qualité des routes, les préfectures minières disposent de moins de routes goudronnées, pavées ou bétonnées (25%) que celles non minières (45%)
En conséquence, 27% des personnes interrogées qui vivent près des sites miniers décrivent leurs conditions de vie comme étant « bonnes » ou « très bonnes » contre 33% pour les répondants vivant dans les préfectures non minières. Toutefois, 30% des résidents dans les zones minières qualifient de « meilleures » ou « bien meilleures » leurs conditions de vie actuelles comparativement à celles d’il y a 12 mois contre 24% des personnes installées dans les préfectures dépourvues d’industries extractives, ce qui suggère des impacts positifs des mesures de « discrimination positive » prises par le gouvernement en faveur des zones minières.
Appelés à évaluer les performances économiques du gouvernement, les Guinéens se disent majoritairement insatisfaits des actions de l’exécutif en matière de création d’emplois (88%) et d’amélioration des conditions de vie des pauvres (84%). Ces évaluations sont presque identiques chez les répondants riverains des préfectures minières et les habitants des zones non minières.
Il est à rappeler dans ce cadre que la Guinée possède un vaste potentiel minier qui représente un pilier essentiel de son économie, au même titre que l’agriculture et l’énergie. Ce pays d’Afrique de l’Ouest dispose de plus de 40 milliards de tonnes de bauxite, 20 milliards de tonnes de fer de haute qualité, ainsi que des quantités significatives d’or, de diamant, d’uranium, de graphite, de cuivre et de pétrole.
Walid Kéfi
Edité par M.F. Vahid Codjia pour www.agenceecofin.com