Situés dans la sous-préfecture de Moussayah, préfecture de Forécariah, les districts de Benna-Layah et Dianéyah risquent de perdre leurs domaines agricoles par l’exploitation minière d’une société de la place, depuis plusieurs années.
Cette société est accusée de ravage et du refus de l’exécution des conditions préalables de délocalisation des secteurs concernés, d’après des habitants de ces différentes localités.
Selon guineemation.com, ces deux localités, sont sévèrement impactées par l’exploitation minière de la société Indienne, ‘’Ashapura’’. Une activité qui, détruit leurs moyens de subsistance et compromet leur avenir.
Depuis plusieurs années, l’exploitation à outrance du minerai de fer menée notamment par la société FGM, Ashapura qui a récemment cédé sa part du marché à une société chinoise, Tahie Mining Company, a profondément bouleversé la vie des habitants et leur environnement. Les populations locales des secteurs de Bassyah et Lansanayah dans le district de Benna Layah, et de Hermakonon et Yomboyeli dans le district de Dianéyah, principalement des agriculteurs, accusent la société minière d’avoir envahi leurs terres cultivables sans réparation adéquate et invitent le gouvernement de la transition à venir à leur secours.
Fodé Amara Bangoura, habitant du secteur de Lansanayah, dans le district de Benna Layah, avec le sentiment de pouvoir atteindre les autorités au plus haut niveau à travers ce reportage, est revenu sur les difficultés auxquelles ils sont obligés de faire face au quotidien. Assis dans une chaise en bois avec des stigmates de l’explosion des mines apparentes sur son visage, le vieil homme se lamente.
« Je commence d’abord par la société FGM qui était là il y a un peu plus de 10 ans. Cette société nous a fait des promesses qu’ils n’ont pas réalisées. Quand nous réclamons cela, ils nous prennent ici pour nous emmener en prison à Forécariah, puis à Kindia. En plus, à chaque explosion de la mine à l’époque, ils nous évacuent loin du village comme des poulets. Après, le soir, ils partent nous chercher pour venir nous abandonner dans le gaz de cette explosion. Ils ont fait 2 ans dans cette condition. La troisième année, ils ont plié bagage. C’est après que la société indienne dénommée Ashapura aussi est arrivée, c’est là où nos souffrances se sont accrues. On passe toute la journée à inhaler la poussière. Quand vous leur dites d’arroser, ils font passer quelques gouttes d’eau sur la surface de la terre et puis c’est tout. Quand tu vois notre nourriture sous la poussière, toi qui connais le danger de la poussière, tu ne peux pas manger. C’est ce calvaire que nous subissons ici, nous n’avons aucune tranquillité. Nos arbres et nos champs cultivables ont été détruits sans aucun dédommagement. Depuis qu’ils sont là, ils ont exporté plus de 14 bateaux de minerais de fer. Toutes les promesses tenues à notre égard n’ont pas été respectées. Aussi, les travailleurs qui sont avec eux ici sont payés comme bon leur semble. Ils donnent aux gens ce qu’ils veulent en termes de salaire et de prime journalière. On s’est battus pour qu’il y ait le syndicat pour les travailleurs, ils n’ont pas accepté. D’ailleurs, c’est une mine qu’on n’a jamais entendu parler à la télé. Nous voyons à la télé les autres sociétés minières, mais jamais celle de chez nous. On a même déplacé le patriarche de la Basse Guinée pour venir constater les réalités afin de défendre notre cause, mais hélas », a expliqué ce vieil homme.
Cependant, cette exploitation intensive a entraîné la destruction de vastes surfaces de terres agricoles, privant les habitants de leurs moyens de subsistance. Mohamed Savané, habitant Bassyah, dans le district de Benna Layah, réclame la réparation à la société Tahie Mining Company présente à la carrière depuis plus de deux mois par rapport aux champs agricoles recensés par une commission mixte.
« Depuis l’arrivée de cette société dans notre village, on ne sait pas c’est quoi leur intention vis-à-vis de notre communauté. Cependant, ils sont en train de s’étendre partout où nous trouvons à manger. Ils ont récupéré presque toutes nos terres cultivables pour des fins d’exploitation. Tout ce qu’ils ont pu faire, c’est de calculer le nombre de plantes sur les champs, puis ils nous ont photographiés. Mais en ce qui concerne le dédommagement, là on n’a rien vu pour le moment. Par rapport à l’employabilité, il n’y a que quelques fils de la communauté qui travaillent avec eux. À un moment donné, nous étions envahis par la poussière. Quand il y a eu soulèvement, ils nous ont soudoyés avec des mots comme quoi on va s’entendre, mais jusqu’à présent rien n’a été dit dans ce sens. On continue à souffrir. Ce que nous demandons à l’autorité, c’est d’abord le recrutement de la main d’œuvre locale. En plus, puisqu’ils disent que les villages concernés par cette exploitation doivent être déplacés, les habitants évacués sur d’autres sites, si cela s’avère, nous exigeons au préalable remplir toutes les conditions de déplacement d’une communauté d’un point A à un point B », a-t-il indiqué.
Cette situation désastreuse a plongé de nombreuses familles dans une précarité alarmante, les privant de leur autosuffisance alimentaire et exposant ainsi les femmes de la localité à une vulnérabilité accrue. Kadiatou Bangoura, femme leader dans le secteur Lansanayah, raconte les difficultés des femmes. Selon elle, les femmes du secteur Lansanayah font face à l’assèchement de leur source de revenu.
« Moi j’ai fait 6 enfants. Mais, tous ces enfants ont été élevés dans le travail de la terre : faire le maraîchage, la culture de l’arachide, faire le mil… Rien de tout cela n’est possible de nos jours, parce que là où nous faisons cette culture est occupé par les activités minières. Avant, avec notre groupement de femmes, nous faisions le fonio à l’effet de le revendre et faire des bénéfices nous permettant de subvenir aux besoins de nos différentes familles et de faire des économies. Aujourd’hui, tout cela est devenu un lointain souvenir. Nous avons nos enfants aujourd’hui difficilement nous parvenons à assurer leurs besoins primaires. Avant, si tu n’en as pas, tu pouvais trouver une amie chez qui emprunter. Mais à date, tout cela n’existe pas. En plus, nous sommes recouverts de poussière. Dieu seul sait les difficultés que nous traversons dans ce village. Nos maris ont tout fait pour nous sortir de cette situation, mais hélas. J’invite donc le gouvernement de nous aider à nous épargner des conséquences néfastes de cette exploitation du minerai de fer. Et surtout profiter des retombées de cette mine dans notre localité », a-t-elle lancé.
En parallèle de l’exploitation des mines, la société minière serait appelée à construire une nouvelle cité destinée aux occupants des villages impactés par le projet. Mais jusqu’à présent les bâtiments devant être bâtis sur une superficie de 20 hectares peine à sortir de terre. Mamadouba Bangoura, invite les autorités à s’impliquer dans la réalisation de ce projet qui conditionne leur départ sur le site.
« Premièrement, nous regrettons le fait qu’on soit appelé à quitter notre village que nous habitons depuis plus de 100 ans. Les autorités nous ont dit qu’il y a longtemps que nous serons déplacés. Nos parents sont allés jusqu’au chef-lieu de la préfecture pour ça. Le préfet de Forécariah leur a alors demandé : pour votre déplacement, qu’est-ce qu’il faut pour vous ? Ce jour, nos parents nous ont dit qu’il faut nous construire 20 hectares. Sur les 20 hectares, à date, il n’y a que 5 hectares qui sont viabilisés. Les 15 autres là, on n’a pas encore vu ça. Le sous-préfet de Moussayah est venu nous demander ici pour savoir combien de maisons on devait construire sur les 15 hectares. On a fait le calcul, c’était 42 bâtiments qu’on a retenus. Mais jusqu’à présent on n’a pas bénéficié de ces maisons. Nous demandons au gouvernement guinéen de respecter cet engagement. Nous ne sommes pas contre notre déplacement, mais il faut que les 42 bâtiments soient construits sur cet espace pour permettre à nous-mêmes et à nos progénitures de mieux s’épanouir là où nous allons nous installer dans l’avenir », a souligné cet agriculteur.
L’enquête à Benna révèle un conflit profond entre les sociétés minières et les communautés impactées. Si l’exploitation minière peut générer des bénéfices pour le pays, elle ne doit pas se faire au détriment des populations locales et de leur environnement. Les autorités, tant locales que nationales, sont appelées à intervenir pour trouver une solution équitable qui assure le développement économique de toute la préfecture de Forécariah sans sacrifier le bien-être des habitants du district de Benna-Layah et Dianéyah.
Avec nos confrères de Guineematin