Le 2 octobre 1958, la Guinée choisissait le courage : dire “Non” au général de Gaulle et au système colonial. Ce refus fit d’elle la première colonie française d’Afrique à accéder à l’indépendance. Soixante-sept ans plus tard, la nation rend hommage à ce moment fondateur, mais aussi s’interroge : que reste-t-il de cet élan de dignité ? Où en est vraiment la Guinée ?
Un héritage historique à la fois glorieux et lourd
La décision de Sékou Touré et des pères fondateurs a marqué l’histoire africaine. Ce fut un acte de fierté nationale, un message de dignité au monde. Mais cette rupture brutale avec l’ancienne puissance coloniale a laissé un héritage complexe : isolement international, fragilité économique et autoritarisme politique. Si l’indépendance a offert la souveraineté, elle a aussi ouvert une longue route semée d’embûches.
Un pays riche, mais un peuple encore pauvre
La Guinée est un “scandale géologique” : bauxite, fer, or, diamant, eau abondante. Pourtant, la promesse d’une prospérité partagée peine à se concrétiser. Les richesses naturelles continuent de profiter davantage aux compagnies étrangères qu’aux populations locales. Les routes, les hôpitaux, l’éducation et l’emploi restent en deçà des attentes. Comment expliquer que 67 ans après l’indépendance, une majorité de Guinéens n’ait pas encore accès aux besoins essentiels ?
Une trajectoire politique heurtée
Depuis l’indépendance, la Guinée a enchaîné les régimes : du parti unique de Sékou Touré à la longue présidence de Lansana Conté, des militaires du CNDD à la transition actuelle menée par le CNRD. Chaque époque a porté ses espoirs et ses déceptions. La Guinée aspire à une démocratie stable, mais reste souvent rattrapée par les tensions politiques, l’instabilité institutionnelle et les luttes de pouvoir.
Des avancées réelles mais insuffisantes
Il serait injuste de nier les progrès accomplis : barrages hydroélectriques, nouvelles infrastructures routières, explosion des télécommunications, émergence d’une jeunesse créative et engagée. Mais ces acquis restent fragiles et mal répartis. La gouvernance, la justice sociale et la lutte contre la corruption demeurent les grands chantiers inachevés.
67 ans : un âge de maturité politique ?
À 67 ans, une nation ne peut plus se contenter de célébrer son passé. L’indépendance ne doit pas être seulement un souvenir glorieux, mais un moteur pour construire un avenir meilleur. La Guinée doit transformer sa souveraineté en prospérité, son potentiel en réalité, son histoire en leçon pour demain.
Entre fierté et exigence
Aujourd’hui, la Guinée peut se regarder avec fierté : elle a résisté, elle a tenu debout, elle est restée souveraine. Mais l’heure est aussi à l’exigence : exigence de bonne gouvernance, de justice sociale, d’unité nationale et de développement concret. L’héritage de 1958 ne sera pleinement honoré que le jour où chaque Guinéen ressentira l’indépendance non plus seulement comme une victoire historique, mais comme une réalité quotidienne.
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